mercredi 5 septembre 2012

Eric Zemmour et la menace HLMiste

Par Seb Musset

2 minutes 57. C'est le temps nécessaire à Eric Zemmour pour propager de la bonne grosse connerie autoqualifiée de "pas politiquement correcte", chargée en clichés xénophobes machos ou antisociaux, auprès de millions d'auditeurs dont j'espère qu'ils ne sont à l'image du titre de sa chronique: "pas dupes".

Ce matin sur RTLle "censuré" s'attaquait à Cécile Duflot (qui vient d'annoncer la cession par l'état de terrains pour la construction de logements sociaux et la multiplication par 5 des pénalités pour les communes ne respectant pas la loi SRU). Submergé par sa détestation des Verts et des femmes au pouvoir, l'Avenger des petites gens en vient à enfiler une série de clichés sur le logement social. Ça ne serait pas si grave si, au lieu de se cantonner au zinc du bar de pochtrons dont elle n'aurait jamais dû décoller, sa daubesque diatribe n'était pas diffusée à 7h (le prime-time de la radio).

Entre ici Rico:

Entre autres moments de grâce, à 0.30 le polémiste reproche à la Ministre du Logement de céder à prix cassé des terrains de l'Etat "alors qu'ils pourraient être vendus à prix d'or et réduire les énormes déficits publics(retiens là bien, ça va nous resservir dans 2 minutes). 

A 1.30, selon Zemmour: Cécile Duflot n'aurait que "mépris" pour cette "nouvelle manie des Français de s'installer loin des grandes villes et de retrouver au calme dans dans leur home-sweet-home avec jardin que leurs spécialistes appellent périurbain" [...] "Duflot veut les forces à réintégrer leur HLM dont ils n'auraient jamais dû sortir".

C'est simple le "pas politiquement correct": L'exode à Pétaouchnok des classes populaires n'est pas dû à la spéculation immobilière dans les villes (en partie entraînée par les lecteurs des pages saumons du canard où officie Zemmour), mais bien à la passion française pour "la nature". Cette même soif de retour à une vie saine et paisible poussant les ménages à se taper 4h de transport par jour, en plus de la pollution des villes où ils travaillent. Faut dire avec ses bons scores FN (motivés en partie par l’exclusion culturelle, le manque réel d'infrastructures et de services publics à proximité et le sentiment de déclassement géographique), le "péri-urbain" c'est un peu la chasse gardée de Zemmour même s'il ne donne pas le sentiment d'y mettre souvent les pieds.

Notons d'ailleurs que Zemmour ne parle pas de villes désertées mais bien de "banlieues". Banlieues bien sûr quittées à cause des dangers de "l'immigration".

A ce stade, je ne sais pas si Duflot veut réintégrer de force "les beaufs"[1] dans les HLM, comme Zemmour l'affirme au fiel, mais une chose est acquise: lui n'en veut pas dans les villes.

Logique. Une minute plus tôt, rappelez-vous, l’intrépide journaliste rageait que l'Etat ne contribue pas  un peu plus à la montée des prix en centre-ville. De là à penser que le chroniqueur en croisade "anti-bobo" habite en ville, qu'il y possède un bien dont il ne veut pas voir baisser la côte, dans un immeuble pas forcément certifié sans immigré mais très certainement garanti sans pauvre, il n'y a qu'un pas que nous nous garderons bien de franchir ici.

Eric Zemmour reproche donc à Cécile Duflot de vouloir imposer un "vivre ensemble obligatoire" (critique pour le moins contradictoire de la part d'un type qui veut en finir avec le multiculturalisme) et instrumentalise l'immigration pour masquer 1 / sa condition sociale de citadin über-peinard 2 / une relégation vers le péri-urbain des familles qui a plus à voir avec une flambée des prix dans le privé et une carence de l'offre sociale.

Malgré les clichés "HLM = clapier" et autre "HLM = immigration", nous rappellerons donc à Rico:
- Qu'il y'a en France 1.7 million de demandes de logements sociaux en attente.
- Qu'à Paris la demande concerne 120 000 familles pour un parc d’environ 180 000 logements. (Que Paris et la petite couronne concentrent les 2/3 des demandes d'Ile-de-France)
- Que le taux de rotation des logements est inférieur à 5% car les familles bénéficiaires d'un logement social n'ont pas les moyens de se loger sur le marché privé, dont les loyers d’entrée sont doubles des loyers de sortie des HLM.
- Que les commissions municipales de désignation (pour les logements sociaux dont la ville est réservataire) voient passer des dossiers de familles consacrant dans le secteur privé plus de 50 à 60% de leur budget au logement.
- Que généralement ceux qui ont un logement social y restent, même si ce dernier est surpeuplé.

 [1] bel usage du discours indirect fantasmé. 

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